dimanche 3 octobre 2010

Culture de Paix : Le « Sinaguya » ou le cousinage à plaisanterie; des vertus inestimables pour l’équilibre de notre pays



Le Mali, issu de grands empires, a donné à l’humanité une constitution plus vieille que celle de 1789. Depuis ces temps lointains, le peuple du Mali est uni par un lien sacré, à savoir le cousinage à plaisanterie, le « SINAGUYA » qui nous permet de régler tous nos différends.

Le « Sinaguya » ou cousinage à plaisanterie est une des valeurs de notre société qui consolide nos liens sociaux et participe à tempérer les ardeurs, la passion ; il crée la solidarité, l’amour entre les frères ennemis et se présente comme une véritable clé pour la résolution de tous les différends.

C’est pour dire que notre pays a été dans le passé comme aujourd’hui un carrefour de brassage culturel, de civilisations. La fierté de ce pays, puisée de la bravoure des ancêtres guerriers intrépides, ne connaît pas la fracture sociale que des insurgés comme Bahanga et Fagaga entreprennent dans notre pays si beau par ses vertus de solidarité et d’hospitalité. Le cousinage est un aspect très important de la culture et occupe une part importante dans l’unification du pays. Cette culture date de plusieurs siècles et repose sur des liens parfois sacrés, tissés entre deux communautés, deux clans. Elle se manifeste par des propos de plaisanteries souvent acerbes mais admis par tous.

Dans l’œuvre épique de Djibril Tamsir Niane, « Soundiata ou l’épopée mandingue », on apprend auprès d’un célèbre griot que le cousinage tient sa source d’un évènement, un serment entre deux ancêtres. C’est le cas entre les TRAORE et les DIARRA, suite à une conquête menée par deux TRAORE contre un mystérieux buffle qui terrorisait la contrée. A l’entrée de la ville, ils croisent une vieille femme qui se métamorphosait en cet animal féroce et invulnérable. En réalité, cette vielle femme répondait à son frère qui l’avait privée de son héritage.

Après le serment avec les deux chasseurs qui lui promettent d’épouser sa fille, d’une affreuse laideur, elle accepte de se livrer et divulgue le secret de son invulnérabilité. Le buffle mort, le roi réunit toutes les belles créatures de son royaume et demanda aux vaillants chasseurs de faire le choix de leur épouse. A la surprise générale, ils choisissent la vilaine fille bossue. Ce fut l’hilarité et la moquerie générales. Le roi DIARRA dit alors les raisons de ce choix. « L’enseignement du cousinage revêt une importance capitale au Mali, pays de plusieurs langues et de plusieurs ethnies. C’est une manière de transmettre aux nouvelles générations et celles du futur les acquis précis du passé pour maintenir l’équilibre social.

Le cousinage est un véritable garde-fou contre les différends sociaux, le mépris des autres. Il assure la solidarité, la confiance, l’humilité, la retenue et surtout le respect et la paix. Il tempère l’orgueil et la démesure dans les comportements ou dans les décisions. C’est un vrai antidote contre la violence. Il ignore le statut social, la richesse de l’individu. Il n’y a rien que les cousins à plaisanterie ne peuvent se dire.

Récemment, un contentieux foncier, né de la décentralisation entre deux communautés villageoises a pu être liquidé par le cousinage. Par sa nature, ses fonctions et son intérêt, le cousinage à plaisanterie peut être une valeur à partager dans la sous région, la francophonie à l’humanité, et être un apport de valeur du Mali à la paix dans le monde.

Fatoumata Haïdara
Source:L'indicateur Renouveau du 15/08/2008.

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