vendredi 26 décembre 2008

Biennale 2008 : DANS LES REGLES DE L’ART


La pièce de théâtre présentée par Ségou agit sur tous les ressorts de l’œuvre dramatique.
Rééditer son succès de la biennale 2005, telle est le désir légitime de la troupe de Ségou. Elle avait obtenu une deuxième place méritée lors de cette manifestation. Cette belle performance était due en grande partie au maximum de points que la troupe de la 4è Région avait engrangés grâce à sa pièce de théâtre. Cerise sur le gâteau, le trophée du meilleur comédien avait été enlevé par l’un de ses acteurs.La troupe a, semble-t-il, tiré une bonne une leçon de ce succès, à en juger par la qualité de la pièce de théâtre présentée au jury mardi soir au stade Abdoulaye Macoro Sissoko. Intitulée « Dougou tigui den » ou la fille du chef de village, l’œuvre résume le drame provoqué par la mort de la fille unique du chef de village lors de son excision.L’auteur, Mamadou Sangaré dit Virus, a su choisir les mots justes et les actions précises pour sensibiliser sur les méfaits de cette pratique ancienne. La pièce agit sur tous les ressorts de l’œuvre dramatique. Le spectateur est capté du début à la fin de la pièce. D’abord par la pertinence du thème et le traitement qui en est fait. L’excision considérée comme source d’une foule de problèmes de santé de la mère et de l’enfant est aujourd’hui décriée par tous les services de santé. La pièce de Ségou réunit tous les ingrédients pour attirer l’attention du public. D’abord grâce à un jeu d’acteurs cohérent. Les comédiens ont su se défaire des gestes inutiles pour aller à l’essentiel. Ensuite par les costumes, les décors, les accessoires de scène, le bruitage et l’éclairage qui collent parfaitement au contexte et qui traduisent les efforts de recherche entrepris par le metteur en scène.Selon les spécialistes, une pièce de théâtre doit respirer comme un homme en bonne santé. D’où l’importance des « fenêtres ». Il s’agit de ces moments de détente permettant aux spectateurs de souffler, afin de mieux se reconcentrer sur la suite. Ségou a aussi usé de cette technique mardi soir.Le seul reproche marquant à faire à la pièce est, en définitive, que certains personnages sont assez mal habités par les comédiens.


Envoyés spéciauxY. DOUMBIA et O. DIOP


CE WEEK-END SERA CHAUD !


La ville de Kayes continue de vibrer au rythme des manifestations artistiques et culturelles de la Biennale. Ce week-end s’annonce très animé. Après les régions de Tombouctou, Mopti, Ségou, Kidal, Sikasso, trois autres troupes entrent en scène. Le week-end démarrera par la troupe de Kayes dont la prestation est évidemment très attendue ce soir sur ses terres et devant son public. La région de Koulikoro et le district de Bamako entrent en compétition respectivement demain et dimanche.La région de Kayes clame, au risque d’agacer certains, que son seul objectif demeure la première place du classement général. En a-t-elle les moyens ? On le verra dès ce soir. En attendant, il faut savoir que les deux airs de compétition de l’orchestre régional sont intitulés « N’tori », le crapaud en langue nationale bambara, et « le chant du coq ». Ce dernier morceau, explique Habou Doumbia, le directeur de la troupe, est joué sur un rythme afro-américain. Le titre rend hommage à tous ceux qui ont lutté pour la reconnaissance des droits des Noirs en Amérique. Il s’agit, on s’en doute, d’un clin à l’élection du premier Noir à la présidence de la première puissance mondiale : Barack Obama.Quant aux autres disciplines que sont l’ensemble instrumental, le chœur, le solo de chant, la danse traditionnelle, la pièce de théâtre et le ballet à thème, elles seront, à l’image du second morceau de l’orchestre, inspirées par l’actualité brûlante. On y délivre des leçons de morale en dénonçant des comportements déviants de la société actuelle. La pièce de théâtre et le solo de chant évoquent l’épineuse question de l’émigration, un sujet particulièrement à-propos dans une région qui fournit traditionnellement de gros contingents de migrants. La lutte contre la corruption a plutôt inspiré le chœur.Quant à la troupe de Koulikoro, son ambition est faire mieux qu’en 2005 à Ségou. La 2è Région semble avoir mis les bouchées doubles pour éviter de rééditer son échec d’alors. Pour ce faire, elle s’est fortement appuyée sur les valeurs du patrimoine qui font la fierté des Bambaras, Maures, Soninkés et Malinkés qui peuplent la région. Mercredi encore, l’ordre de passage des numéros n’était pas encore établi. Sékou Sangaré, le directeur de la troupe nous a expliqué à ce propos, que les différents ateliers continuaient à peaufiner leur travail. C’est cet ultime revue qui déterminera l’ordre de passage. On sait néanmoins qu’à l’instar d’autres troupes, l’orchestre ouvrira le bal. Son premier titre est un hommage à Djoba Diarra, le fondateur de la ville de Koulikoro. Et le second intitulé « Nèguè koro sigui » évoque l’excision des filles. Les thèmes relatifs à la femme sont privilégiés dans les autres créations comme le rôle de la mère dans le mariage d’une fille en milieu soninké pour l’ensemble instrumental. « Le temps », est une pièce qui évoque la fidélité indéfectible de la femme à son époux et à la société. Le ballet raconte les aventures des aide-ménagères dans les grandes villes. Celles-ci sont victimes de nombreux abus comme les harcèlements sexuels et les escroqueries et de toutes sortes de mauvais traitements. Le solo et le chœur s’intéressent respectivement à l’exode rural et à la jeunesse.C’est dimanche que la troupe de la capitale se produira sur les planches du stade Abdoulaye Macoro Sissoko. Ses responsables se disent sereins, malgré la pression croissante que font peser sur le District, ses concurrents. La capitale est la cible de tous pour la détrôner. Les Bamakois ont donc un avantage psychologique et entendent bien s’appuyer dessus pour ratisser un maximum de points dans les disciplines majeures comme la pièce de théâtre, l’orchestre et le ballet et ne pas être ridicules dans les autres domaines. Comme en football, sa géographie aide la capitale qui peut entretenir sa troupe en permanence ou presque. Ainsi de septembre à décembre, la troupe de Bamako effectuait deux répétitions par semaine, explique Moussa Mariko, le directeur de la troupe. L’avantage est indéniable mais de peu de poids sans le talent et l’inspiration. Ces qualités, Bamako a démontré par le passé qu’il les avait. Qu’en sera-t-il cette fois ? La capitale surfera sur l’actualité : la crise économique mondiale qui frappe de plein fouet les ménages, la paix au Mali et en Afrique, l’émigration. Ces questions sont abordées par l’orchestre, le chœur, le solo de chant et l’ensemble instrumental. Quant à la danse traditionnelle, elle met en scène l’initiation des jeunes en milieu bambara à Bougouni.Le ballet est intitulé « Guedo, l’enfant terrible ». Il faut rappeler que lors des trois dernières éditions, le ballet de Bamako dirigé par Karim Togola s’est toujours classé premier et que son auteur et metteur en scène a toujours remporté le trophée du meilleur maître de ballet. Il n’a nulle intention de déroger à cette agréable habitude.

Y.D. et O. D.

Source:l'Essor n°16351 du - 2008-12-26

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